Châteaubriant
La ville et son château sont liés à l’histoire des frontières du duché de Bretagne et du royaume de France.
Béré, les origines
Châteaubriant trouve son origine à Béré (actuel quartier de la ville), site occupé par un peuple gaulois dont les archéologues ne sont pas certains de la provenance, car il s’agit d’une zone frontalière entre plusieurs peuples. A l’époque mérovingienne (du Ve au VIIIe siècles) on trouve trace de monnaies frappées à Béré. A l’époque carolingienne (du VIIIe au Xe siècle), le bourg de Béré se développe et compte trois églises.
C’est ensuite un certain Brient qui y fonde au XIe siècle un château sur une motte. Il suit en cela la volonté du comte de Rennes, son allié, qui veut contrer les comtes d’Anjou et de Nantes.
Brient donne également un emplacement à l’abbaye de Marmoutier (région actuelle de Tours) qui va y fonder un prieuré et un bourg. La future ville se développe en deux endroits : autour du château (bourg castral) et autour du prieuré. On y compte une halle et un hôpital.
Le château devient une place stratégique dans le réseau fortifié de la Marche de Bretagne.
La Marche de Bretagne
C’est Pépin le Bref (714-768), roi Franc, qui en 752 mène une expédition victorieuse contre Vannes, et décide de la création d’une zone frontière qui inclus les comtés de Vannes, de Nantes et de Rennes et est dirigée par un préfet. Cette « Marche » marque tout à la fois une zone de surveillance et une base arrière pour les expéditions royales contre les Bretons. La Marche étant une zone frontière, elle sert dans les deux sens, tantôt aux Francs, tantôt aux Bretons, au gré des alliances. Le comté de Nantes devenu breton en 851 permet d’assurer la défense du duché face au Poitou et à l’Anjou.
Châteaubriant est alors le théâtre de plusieurs attaques et combats : par exemple entre les barons de Vitré et les comtes d’Anjou, ou encore, lors de l’occupation de la ville en 1234 sous Louis IX, - Saint-Louis (1214 - 1270). Des remparts sont donc construits et renforcés entre le XIIIe et le XVe siècle, et des douves sont creusées.
La seigneurie de Châteaubriant devient puissante au XIIIe siècle, notamment avec des personnages comme Geoffroy III et Geoffroy IV de Châteaubriant qui savent trouver les bonnes alliances pour accroître leur pouvoir.
Châteaubriant sera encore dans les combats pendant la Guerre de Succession de Bretagne (1341 -1364) qui voit les partisans des Montfort (soutenus par l’Angleterre) et ceux des Penthièvre (alliés du roi de France) s’affronter pour la succession du duché de Bretagne. La famille des seigneurs de Châteaubriant soutenant les Penthièvre.
Françoise de Dinan (1436 - 1499)
Au XVe siècle, la seigneurie de Châteaubriant appartient à la famille de Dinan-Montafilant. L’héritière, Françoise de Dinan épouse en secondes noces Guy XIV de Laval-Vitré, puissant seigneur. Veuve en 1486, elle devient ensuite en 1488 la gouvernante de la future duchesse de Bretagne et reine de France, Anne de Bretagne (1477 - 1514), dont le père est le duc François II (1435 - 1488).
Au moment de ce que l’on a appelé la Guerre Folle (1485 - 1488), qui oppose une coalition de seigneurs à Anne de France (1461 -1522), régente de son frère, le futur roi Charles VIII (1470-1498), Françoise de Dinan prend le parti de la couronne de France au lieu de soutenir le duché de Bretagne et François II. François II, quant à lui, complote contre Charles VIII avec Louis d’Orléans (1462 - 1515), son cousin, à qui aurait pu revenir le trône de France.
Si tout ceci n’était déjà pas assez complexe…c’est aussi le moment de la Guerre de Bretagne (1465 - 1491), là encore pour des questions de succession et d’intérêts qui mêlent le royaume de France et le duché de Bretagne, ainsi que leurs alliés en Europe.
Françoise de Dinan accueille alors à Châteaubriant des nobles bretons qui y signent en 1487 un traité demandant l’aide du roi de France contre le duc de Bretagne. Ce qui a pour conséquence de voir Charles VIII se rendre, alors de façon pacifique, à Châteaubriant avec ses armées en 1487.
Mais l’année suivante en 1488, Charles VIII lance une campagne contre la Bretagne. C’est Louis de la Trémoille (1460 - 1525) qui fait le siège de Châteaubriant pour le compte du roi de France : la ville et le château subissent de nombreux dommages. 1488 est aussi l’année de la défaite bretonne à la bataille de Saint-Aubin du Cormier, le 28 juillet, puis du Traité du Verger, le 19 août qui marque la signature de la paix. François II, meurt peu après, le 9 septembre.
L’année 1488 est enfin l’année pendant laquelle Françoise de Dinan devient gouvernante d’Anne de Bretagne, qui se marie en premières noces au roi de France Charles VIII en 1491.
Renaissance et changement de propriétaires
Le petit-fils de Françoise de Laval, Jean de Laval-Châteaubriant (1486 -1553) va poursuivre les aménagements du château déjà engagés par sa grand-mère. Il est gouverneur de Bretagne et son épouse, Françoise de Foix (1495 -1537), est l’une des favorites du roi François 1er (1494 -1547). La chambre dorée, chambre de Françoise de Foix au château de Châteaubriant est d’ailleurs l’objet d’une légende : lorsque, délaissée par le roi elle revient sur ses terres, son époux, Jean de Laval, l’y aurait assassinée. La chambre depuis est réputée hantée par les trois protagonistes de l’histoire…
Jean de Laval, sans héritier, lègue le château et la baronnie de Châteaubriant à Anne de Montmorency (1493-1547), homme illustre et puissant, connétable de France, qui possède 600 fiefs.
Les changements de propriétaires affectent aussi la vie de la cité, suivant les alliances qu’ils tissent. Ainsi, pendant la guerre de la Ligue en Bretagne (1588 -1598), Châteaubriant est acquise aux catholiques et va être plusieurs fois l’objet d’attaques des troupes du roi Henri IV. En 1598 les attaques sont violentes, et la ville comme le château en font les frais.
Au XVIIe siècle les Montmorency sont en disgrâce, leurs biens confisqués par la couronne de France et donnés à Henri de Bourbon-Condé (1588-1646), prince de Condé. Châteaubriant demeure propriété des Condé quasiment sans discontinuer jusqu’à la Révolution.
Ensuite…
Le château est confisqué à la Révolution et va connaître diverses fortunes et infortunes (logement de soldats, prison, etc.). Henri d’Orléans, duc d’Aumale (1822 - 1897) en est le dernier propriétaire privé en 1845. Le département en fait l’acquisition en 1853 et le château est alors dédié à l’occupation de différentes administrations.
Pendant la Seconde Guerre Mondiale il est réquisitionné par l’armée allemande qui s’y installe. 27 otages seront fusillés à Châteaubriant le 22 octobre 1941, parmi lesquels figurent Guy Moquet et Charles Michel.
Le château de Châteaubriant
Il a été classé aux Monuments Historiques en 1921 et restauré en plusieurs endroits.
Le château ne se visite pas dans son entier, mais sont accessibles : la Chambre dorée, la Grande Galerie, l'escalier d'apparat et le chemin de ronde de la haute-cour. Néanmoins, ses éléments d’architecture sont d’une grande richesse, des remparts médiévaux au château Renaissance, et on peut les découvrir de l’extérieur en retraçant son histoire.
Dans l’ancienne maison du duc d’Aumale, un espace est aménagé avec des animations vidéo permettant découvrir l’histoire du château. Dans le grand logis médiéval, c’est un espace 3D qui, via une table interactive permet d’explorer la forteresse médiévale, ou de revivre le siège de 1488, mais aussi de survoler le château Renaissance !
Le parc du château est en accès libre, ainsi que la promenade du duc d’Aumale qui a fait l’objet de travaux et d’un aménagement paysager qui permet, depuis 2021, de s’y promener en longeant l’étang de la Torche, et en découvrant des perspectives sur le château.
Des idées de visites ainsi que des plans du château sont accessibles ici.
La carrière des Fusillés de Châteaubriant
Suite à l’assassinat du Feldkommandant de Nantes Karl Hotz, par des militants communistes, les autorités allemandes exécutent 48 otages à Nantes, au Mont Valérien à Paris et à Châteaubriant. Les 27 de Châteaubriant sont des militants communistes internés au camp de Choisel par les autorités de Vichy. Le 22 octobre 1941 ils sont conduits à la carrière de la Sablière et exécutés.
C’est sur le lieu même de l’exécution que se dresse une sculpture monumentale d’Antoine Rohal qui met en exergue le courage et la solidarité des otages de Châteaubriant. Les 27 portraits des victimes morts pour la France se dresse en un arc de cercle autour du monument.
Parmi les martyres Guy Moquet, 17 ans nous a laissé une lettre pathétique : ”Les copains qui restez, soyez dignes de nous, les 27 qui vont mourir”.
Plusieurs bretons figurent parmi les victimes, parmi lesquels Pierre Guéguin ancien maire de Concarneau, Marc Bourhis, instituteur à Trégunc, Maximilien Bastard de Nantes, Eugène Kerivel de Basse-Indre, Julien le Panse de Nantes.
Le site de la Carrière sur la route de Laval est en accès libre de 9h à 18h. On y voit le monument et le parcours mémoriels avec les 27 panneaux commémoratifs.
Le musée de la Résistance est installé dans l’ancienne ferme à l’entrée du site. Il contient 500 pièces originales illustrant l’histoire de la Résistance en France.
Église Saint-Jean-Baptiste de Béré
Cette église a été construite au XIe siècle ou dans la première moitié du XIIe siècle. Témoin des origines de Châteaubriant, elle est située dans l’ancien faubourg qu’était Béré. Elle possède un beau retable Baroque, et une chapelle de l’Ecce Homo (expression latine attribuée à Ponce Pilate désignant Jésus : « voici l’homme ») du XVIIe siècle.
L’église a été abandonnée pendant la Révolution, puis elle a été rendue au culte en 1839.
La Foire de Béré
En 1050 l’évêque de Nantes confirme la donation des revenus de la foire de Béré (nommée foire Saint-Hilaire) par le seigneur Brient à l’abbaye de Marmoutier, c’est donc dire si ses origines sont anciennes ! Il est même probable qu’une ait existé plus anciennement depuis les mérovingiens. Au XIIIe siècle, la foire est dite de la Sainte-Croix de Béré, ainsi elle témoigne du lien de l’époque entre les travaux agricoles, la religion et le commerce. C’est aussi un moment festif qui, avec le temps, s’est agrémenté de cirques, attractions et animations.
L’emplacement de la foire est toujours au Champ Saint-Père depuis ses origines, et sa date est le 14 septembre.
Les livres et articles
Alain Salamagne, Monique Chatenet, Laure le Tallec, Le château de Châteaubriant, Éditions Grand Patrimoine Loire-Atlantique, 2023.
Charles Goudé, Amédée Guillotin de Corson, Histoire de Châteaubriant, baronnie, ville et paroisse, Éditeur Michel Pinsonnay, (réédition de l’ouvrage du XIXe siècle), 2022.
Aubrée David-Chapée, Anne de France : Gouverner au féminin à la Renaissance, Éditions Passés Composés, 2022.
François Le Bœuf, Denis Pilet, Châteaubriant, Loire-Atlantique, Éditeur Caisse Nationale des Monuments Historiques, 1997.
Les sites Internet
Office de tourisme de Châteaubriant-Derval : c'est par ici!
Khodex : les foires au Moyen Âge.