Abbaye de Beauport
l'abbaye maritime
Fondée au XIIIe siècle par les chanoines de l’ordre de Prémontré, l’abbaye de Beauport est l'ensemble monastique le mieux préservé en Bretagne. Qualifiée « d’abbaye maritime », elle s’est développée pendant 600 ans en lien avec la mer sur un site exceptionnel. Elle est classée Monument Historique depuis 1862.
Les Prémontrés
Devise : « Paratus ad omne opus bonum » - « Prêt à toute œuvre de bien ».
La date retenue pour la fondation de l’abbaye est celle de 1202. Elle est fondée par la volonté du comte Alain de Goëlo (1150 ? - 1212), dont le pouvoir est alors en pleine ascension. Il y transfère les biens de l’abbaye de Saint-Rion, qu’il avait établie quelques années plus tôt sur une île en baie de Paimpol, mais qui s’était étiolée. Ce sont des chanoines prémontrés venus de l’abbaye de La Lucerne, en Normandie, qui s’installent dans le nouveau site ; Beauport allait rester la seule fondation de cet ordre monastique en Bretagne.
L’ordre des chanoines réguliers de Prémontré, fondé en 1121 dans le Nord-Est de la France, suit la règle de saint Augustin. Il s’agit de chanoines et non de moines, leur fondateur ayant choisi la forme canoniale prônée par saint Augustin, dont l’un des traits est une vie en communauté au service des autres (avec prédication et encadrement des fidèles) et non une vie en retrait du monde, centrée sur la prière et la méditation.
Un héritage conséquent
L’abbaye de Beauport est bien dotée à l’arrivée des chanoines puisqu’elle hérite des possessions de l’ancienne abbaye : les reliques de saint Rion et saint Maudez (qui sont considérés, avec saint Budoc, comme les fondateurs du monachisme sur la côte de Goëlo) neuf églises en Angleterre, dans l’évêché de Lincoln, des églises à Lannevez et Perros Hamon, Bréhat avec Benniguet, Lanvignec (évêché de Dol).
Elle a également des droits sur le sel, sur des sècheries, des pêcheries à Paimpol, des bois, un moulin.
La nouvelle abbaye obtient aussi ensuite la grande paroisse de Plouézec, et plus loin vers le sud des paroisses jusqu’à Plouvara, Chatelaudren et Boquého, ainsi que des jours qui lui sont réservés à la Foire de Paimpol qui sera nommée plus tard « Foire des Moines ». Elle fait aussi l’objet de nombreuses donations.
Du XIIIe siècle au XVIIIe siècle.
Largement dotée dès sa fondation, l’abbaye est rapidement construite : église, cloître, bâtiments monastiques (salle capitulaire, dortoir, cuisine, réfectoire, celliers), bâtiments pour les serviteurs du monastère, bâtiment d’accueil (grande salle des hôtes, dite Salle-au-Duc). L’abbaye poursuit son développement entre le XIIIe et le XVe siècle.
Forte de ses bases, entre le XIIIe et le XVe siècle l’abbaye poursuit son développement. Les chanoines font effectuer un considérable travail d’endiguement de leur terrain qui descend vers la mer. Il faut aménager et réguler les cours d’eau. Ils ouvrent une banque de prêt pour lutter contre l’usure. Ils relèvent maintenant directement de l’autorité du pape et non de celle des évêques. En 1532 l’abbaye est soumise à la « commende » voulue par le roi de France François Ier et le pape Léon X : les abbés sont désignés par le roi. Les chanoines de l’abbaye de Beauport tentent de résister à cette mesure. La réforme de l’ordre au XVIIe siècle les touche également, mais les chanoines finissent par l’accepter en 1630.
L’état de ces bâtiments s’étant dégradé et la réforme passant en application, entre le milieu du XVIIe siècle et le XVIIIe siècle de nombreux travaux sont effectués. Ils témoignent des aménagements de tous les espaces de la vie quotidienne et spirituelle des chanoines. On construit une bibliothèque, une cuisine, un réfectoire, mais aussi des celliers, une grande salle, dite Salle-au-Duc, qui abritera au XXe siècle une cidrerie. Enfin, un cloître, la salle capitulaire (lieu pour les réunions), la sacristie et l’église.
La sécularisation des biens du clergé à la Révolution a pour conséquence la fermeture de l'abbaye et sa vente en 1790.
Et depuis…
L’abbaye et son domaine sont achetés en 1792 par des particuliers et ils resteront privés jusqu’en 1992, date à laquelle le Conservatoire du Littoral en fait l’acquisition. L’abbaye fait partie du site Natura 2000 du Trégor-Goëlo.
Le site a ensuite été en travaux pendant 20 ans. Il faut restaurer le bâti, mais également les jardins, et tout le domaine…
Plusieurs campagnes de fouilles archéologiques y ont été menées, qui ont notamment porté sur le réseau très élaboré de canaux et de canalisations de l’abbaye et du domaine, d’alimentation en eau et d’évacuation des eaux.
Au-delà de l’aspect archéologique, les équipes de restauration ont également acquis un fonds iconographique des propriétaires du XIXe siècle composé de 450 plaques de verre et 700 tirages papier, qui permet de documenter les villégiatures de l’époque dans la région de Paimpol.
Avec l'aimable relecture de Yves Gallet, professeur d'histoire de l'art médiéval - Université Bordeaux Montaigne.
Les ruines et bâtiments de l’abbaye de Beauport
L’ensemble est unique et magnifique. Il allie pierre, végétal et horizon maritime. L’abbaye en elle-même se découvre en visite libre ou accompagnée. Une salle en début de visite présente une exposition retraçant l'histoire de l'abbaye.
En découvrant les différentes salles on prend toute la mesure de son architecture gothique. Beauport est d’ailleurs le site monastique médiéval le mieux conservé de toute la Bretagne : on peut encore y visiter l’église abbatiale, le cloître, la salle capitulaire et les différents espaces du monastère : dans l’aile Ouest, le bâtiment des convers ; dans l’aile Nord, les deux celliers surmontés de la cuisine et du réfectoire des moines ; dans l’aile Est, la salle capitulaire ; en-dehors du cloître, la grande Salle-au-Duc. Certains endroits sont restaurés, d’autres sont des ruines, mais tous contiennent de nombreux détails architecturaux, qui renseignent tant sur les anciens chanoines que sur la vie de l’abbaye.
Par exemple la Salle-au-Duc qui possède une superbe voute d'ogives. Le réfectoire, aujourd'hui à ciel ouvert, de 34,50 mètres de long et 7,50 mètres de large et dont les grandes baies offrent de belles vues sur les extérieurs. La salle capitulaire, aux clés de voutes et chapiteaux décorés qui contient les pierres tombales de deux abbés, ou encore les deux celliers, le petit et le grand.
Vous pourrez également observer les nombreux et différents types de matériaux ayant servi à sa construction, du grès rose de Plourivo, aux schistes bleutés, comme des spilites (roches volcaniques) sans oublier la célèbre « pierre verte » de Paimpol, qui a permis de réaliser des détails sculptés d’une qualité exceptionnelle.
Le domaine de l’Abbaye
C’est un lieu remarquable qui s’étend sur plus de 100 hectares. D’un côté se trouve la façade maritime avec les grèves et les roselières (où poussent les roseaux), comme les prés salés ; de l’autre, les bois et ruisseaux.
Autour de l’abbaye on trouve un jardin et un verger de pommiers. Véritable conservatoire, ce dernier compte 60 variétés préservées. Les vergers de l’abbaye produisent toujours du cidre aujourd’hui. On peut aussi y découvrir un jardin de simples (plantes médicinales), un jardin clos, ou un jardin à la française.
Saules, peupliers, rosiers, lierre et hortensias se mêlent aux ruines et au bâti, et à la découverte du paysage vers l’océan. Le lieu témoigne d’un certain romantisme en même temps que de la grande simplicité recherchée par les moines prémontrés.
De nombreuses animations et ateliers s’y tiennent au fil des saisons, à découvrir sur le site de l’abbaye. Le site contient de très belles photos qui permettent d’avoir un avant-gout du lieu et de l’atmosphère qui y règne : elles sont à découvrir ici.
Archipel et île de Bréhat
Beaucoup la connaissent, au moins de nom. Une île qui est le premier site naturel classé en 2007, et une île entièrement piétonne. Comme elle a un charme certain entre ses murets et ses ruelles fleuries près du port, et ses grandes grèves sauvages à l’autre bout de l’île, elle est très fréquentée, et son accès est réglementé avec un seuil de fréquentation entre mi-juillet et fin août.
L'embarquement pour Bréhat se fait au port de l'Arcouest à Ploubazlanec, à quelques kilomètres de Paimpol.
Festival du chant de marin
Paimpol les 8,9,10 août 2025, sur la thématique du Québec.
Un évènement à ne pas laisser passer, le Festival du chant de marin de Paimpol qui entre dans sa 16e année ! Des chants de marins, bien sûr, mais aussi des musiques du monde, de la musique partout dans les rues et sur les quais, des expositions et des animations, et quelque 200 bateaux du patrimoine.
Les livres et articles
Vincent Launay, « Les réseaux aristocratiques de la Bretagne septentrionale au prisme des enquêtes royales de 1235 », dans Annales de Bretagne et des pays de l’Ouest, (n° 130), p. 7-26, 2022.
Dominique-Marie Dauzet, L´ordre de Prémontré. Neuf cents ans d'histoire, Éditions Salvator, 2021.
Yves Gallet, « L’abbaye de Beauport », Congrès archéologique de France (session 2015 : Côtes-d’Armor), Paris, Société Française d’Archéologie, p. 353-379, 2017.
Jean-René Ladurée, compte rendu de Cédric Jeanneau (dir.), « Un scriptorium et son époque : les chanoines de Beauport et la société bretonne au Moyen-Âge », dans Annales de Bretagne et des pays de l’Ouest (n° 124-4), pp. 194-198, 2017.
Yves Gallet, « Beauport : architecture, hiérarchie, circulations dans une abbaye prémontrée du XIIIe siècle », dans Cédric Jeanneau (dir.), Un Scriptorium et son époque : les chanoines de Beauport et la société bretonne au Moyen Âge, Brest, CRBC, p. 253-264, 2015.
Cédric Jeanneau (dir.), Un Scriptorium et son époque : les chanoines de Beauport et la société bretonne au Moyen Âge, Brest, CRBC, 2015.
Yves Le Bonniec, Autour de la naissance de l'abbaye de Beauport, dans Mémoires de la Société Historique et Archéologique de Bretagne, t. XCI, 2013.
Yves Gallet, « Lire la pierre comme un marqueur spatial et fonctionnel : l’exemple de l’abbaye de Beauport (Côtes-d’Armor) au XIIIe siècle », dans Yves Gallet (dir.), Ex quadris lapidibus. La pierre et sa mise en œuvre dans l’art médiéval. Mélanges d’histoire de l’art offerts à Éliane Vergnolle, Turnhout, Brepols, 2011, p. 203-220.
Pascale Techer, « Le dépôt lapidaire de l'abbaye Notre-Dame de Beauport : Une invitation à la relecture de cinq siècles d'architecture », dans Delphine Hanquiez (dir.), Regards sur les dépôts lapidaires de la France du Nord, Publications du CRAHM, pp 37-51, 2011.
Annie-Claude Ballini (dir.), Abbaye de Beauport. Huit siècles d’histoire en Goëlo, Beauport, 2002.
Jean-William Hanoteau (peintre, illustrateur et architecte), L’Abbaye de Beauport, Gallimard, Conservatoire du Littoral, 1996.
Prosper Mérimée, « Abbaye de Beauport », dans Notes d'un voyage dans l'Ouest de la France, Librairie de Fournier, 1836.
Sites internet
Annie-Claude Ballini, Présidente de l’Association des Amis de l’abbaye de Beauport, « Recherches et découvertes récentes à l’abbaye de Beauport (1995 -2012) » :
https://www.shabretagne.com/scripts/files/5f467740a4e104.74163679/2013_…
Association des Amis de l’Abbaye de Beauport : http://amisdebeauport.fr/index.php/2018/04/20/presentation-generale-des-cahiers-de-beauport/
Office de Tourisme Guingamp - Baie de Paimpol :
https://www.guingamp-paimpol.com/